PÉDAGOGIE : ET SI ROUSSEAU AVAIT DÉJÀ TOUT DIT ? 2/2

En 1761, Jean-Jacques Rousseau, philosophe des Lumières, écrit un traité qui révolutionne la manière de penser l’Éducation… à tel point qu’il est censuré moins d’un an plus tard ! Il défend une « éducation négative », qui consiste à laisser l’enfant apprendre librement. Une vision proche de celle défendue par les écoles alternatives comme Montessori, qui fleurissent un peu partout en Europe. Jérôme LÈBRE nous rejoint pour nous aider à comprendre comment la pensée rousseauiste s’est frayée un chemin jusqu’à l’école d’aujourd’hui !

« L’éducation rend malheureux. »

Y a-t-il plus joueur qu’un enfant ? Ces petits êtres sont tous capables, dès leurs premiers jours, de s’émerveiller de leur propre main, de se tordre de rire après avoir sauté dans une flaque et de jouer pendant des heures à rester cachés. L’enfant est un être de plaisir, et le plaisir est une force, nous dit Rousseau. La curiosité naturelle de l’enfant et son plaisir de découvrir et d’expérimenter l’inscrivent dans des dispositions idéales pour apprendre.

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Pourtant, loin de cultiver cette soif naturelle d’apprendre, l’Éducation du XVIIIe siècle soumet et restreint. Rousseau va même jusqu’à affirmer qu’elle tend à rendre malheureux, et ce pour deux raisons : l’immobilité et la verticalité.

Le philosophe s’en prend notamment à une pratique autrefois très répandue, celle de l’emmaillotage. Pour empêcher le nourrisson de se blesser, on l’enveloppait étroitement dans un linge, l’emprisonnant dans une immobilité bienveillante mais forcée. Cet emmaillotage se poursuit symboliquement pendant toute l’enfance : enfermé dans une salle de classe, forcé à rester assis, sans bouger… l’enfant ne peut pas évoluer librement dans son environnement. Un élève a la bougeotte ? C’est normal ! Selon Rousseau, le mouvement est à la fois source de plaisir et d’apprentissage ; il faut donc le permettre, voire l’encourager.

La deuxième critique de Rousseau, fortement corrélée à la première, concerne la transmission très descendante du savoir. Le précepteur de l’époque impose des connaissances à retenir par cœur, sans chercher à apprendre à l’enfant à réfléchir par lui-même, et encore moins à faire ses propres expériences. Une approche finalement très… sophiste ! (Eh hop, le lien de l’article précédent pour ceux qui l’ont manqué)

« L’enfant doit s’éduquer seul. »

L’étymologie du mot « éducation » est double et doublement intéressante : du latin educare, « nourrir » ou educere, « élever ». Faut-il donner la béquée ou apprendre à l’enfant à tenir sa cuiller pour qu’il puisse devenir autonome ? Finalement, l’éducation est peut-être un peu des deux…

Avec son élève imaginaire, Émile, Rousseau expérimente une pédagogie étonnante que Jérôme LÈBRE nous décrit : « Au début, l’éducation doit être négative, dans le sens où il faut vouloir ne pas éduquer. Il faut laisser l’enfant s’éduquer tout seul. Le précepteur agit sur l’environnement pour que l’environnement éduque mieux l’enfant. »

Contrairement aux sophistes grecs qui éduquaient pour former des citoyens en transmettant les compétences utiles pour gouverner, Rousseau cherche à former des hommes et des femmes libres. L’enfant n’est pas un « moyen » vers un homme idéal, mais bien une « fin ». Selon le philosophe, la société est corrompue tandis que l’homme est naturellement bon. En toute logique, l’éducation idéale consiste selon lui à accompagner le développement naturel de l’enfant sans s’interposer, tout en instaurant un cadre propice à l’apprentissage. En expérimentant par lui-même, l’enfant retrouve du plaisir ; l’éducation le rend alors libre et heureux.

« Songez bien que c’est rarement à vous de lui proposer ce qu’il doit apprendre ; c’est à lui de le désirer, de le chercher, de le trouver. », Troisième livre de l’Émile ou De l’éducation. Voilà une phrase qui résume bien la pensée de Rousseau et qui nous fait d’ailleurs penser à une autre école de pensée bien plus contemporaine… Eh oui, je parle bien des pédagogies alternatives, en particulier des écoles Montessori, Freinet, Steiner Waldorf, etc., dans lesquelles les enfants vont vers les sujets qui leur plaisent et apprennent à leur rythme dans un cadre protégé.

Bien que la méthodologie de Rousseau telle que décrite dans son traité ne soit pas applicable à grande échelle, elle marque un tournant dans l’histoire de la pensée de l’Éducation et inspire encore aujourd’hui.

Dans PowerZ, l’enfant apprend à son rythme. Il explore le monde, se découvre des passions et va librement vers les apprentissages qui l’intéressent. Le jeu récompense sa curiosité et son imagination !